Ma pratique commence par le toucher. Je travaille avec des instruments physiquement réactifs, riches sur le plan sonore et conçus pour l’immédiateté. Qu’il s’agisse du glissement tactile d’un contrôleur ruban ou du dialogue gestuel réactif offert par les instruments Buchla, je m’appuie sur des outils qui engagent le corps et permettent un contrôle nuancé du timbre et de l’articulation. Ce sont des instruments que j’ai apprivoisés au fil des années, en développant une aisance par la répétition et l’intuition. Les limites propres à chaque système m’invitent à creuser plus en profondeur, plutôt qu’à courir après des possibilités infinies.
J’aborde la performance comme une construction en direct. J’arrive avec une boîte à outils—peut-être un fragment de mélodie, une séquence, un ensemble d’échantillons, ou simplement l’instrument lui-même. Chaque pièce se déploie dans l’improvisation, façonnée par les instruments, par des collaborateurs et collaboratrices issus de disciplines croisées, et par la tension chargée de la proximité avec le public. J’aime détourner les attentes : créer une tension émotionnelle et une intimité, perturber le rôle traditionnel du spectateur, et composer des moments qui flottent entre illusion sonore et rituel.
Certains instruments sont devenus centraux dans cette approche. Ce qui continue de m’attirer vers le Buchla Music Easel, c’est sa voix unique : une richesse timbrale, une réponse tactile, et une sensibilité profonde aux nuances du geste. Mon lien avec les ondes Martenot a commencé par une recherche sur les premiers instruments électroniques, et s’est approfondi à mesure que j’en explorais la capacité expressive et l’immédiateté émotionnelle. Ce chemin m’a éventuellement menée à Tiohtià:ke/Montréal, une ville marquée par une tradition électroacoustique vibrante et une communauté rare d’ondistes, de compositeur·trice·s et de collaborateur·trice·s.
Ce qui m’intéresse, c’est comment le son crée une présence. Je cherche à établir des conditions qui invitent un basculement—quand l’attention, la sensation et le son s’alignent pour devenir quelque chose qu’on ressent.